mercredi 5 octobre 2016

Conférence Samedi 5 novembre 2016

Le groupe reprendra ses activités de l’année 2016-2017 par deux communications :

Arthur MITTEAU (Inalco) 

Titre : Autour de deux concepts de l’esthétique : les évolutions croisées d’Ernest Fenollosa et Okakura Tenshin 岡倉天心 comme une critique interne du modèle intellectuel de l’esthétique.


Résumé :Il y a beaucoup de façons de définir aujourd’hui le terme d’« esthétique » ; ainsi, sur un plan académique, le terme devient souvent synonyme de « philosophie de l’art » ou de « philosophie de l’œuvre d’art » en général. Mais dans l’esthétique du dix-huitième siècle occidental, contexte intellectuel dans lequel est né le terme lui-même, celui-ci désigne un ensemble d’approches fédérées par un questionnement autour de notions centrales comme le goût ou encore le beau. L’esthétique est alors d’une part, caractérisée par une insistance sur le pôle de la réception (le spectateur de l’œuvre), de l’autre par son approche globale, totalisante, sur les différents genres artistiques qui tombent dans son champ : elle se définit par le fait d’aborder tous ces arts sous l’angle de questions identiques, tournant autour de la question de la nature du jugement de goût, c’est-à-dire de l’expérience esthétique elle-même.
Cette approche totalisatrice a pu servir, historiquement, à appliquer l’esthétique en tant que modèle non plus théorique et hypothétique, mais normatif : ainsi lorsque le néo-classicisme du XIXe siècle occidental, appuyé sur le discours esthétique issu du romantisme, a au fond aidé à promouvoir un modèle civilisationnel, celui de la civilisation occidentale en pleine expansion impérialiste. Mais que se passe-t-il lorsque ce même modèle est transposé dans d’autres champs culturels ? C’est pourtant ce que nous faisons aujourd’hui, peut-être naïvement, lorsque nous disons d’une estampe ukiyo-e qu’elle est « belle ». Ce faisant, même si l’expérience du « beau » n’est pas non plus a priori le propre d’une seule histoire (celle de l’Occident), nous nous plaçons dans la continuité d’un tel paradigme, alors même que nous pouvons savoir que l’approche totalisante propre à l’esthétique comporte en elle-même le germe de son utilisation ethnocentrique, réductrice par rapport aux innombrables significations des activités que nous appelons « arts ». Une approche philosophique opérant par distinctions, nourrie de recherches historiques, peut nous aider à amorcer une réflexion sur notre propre rapport à l’expérience esthétique, et aux différents sens qu’elle peut recouvrir.

L’exposé étudiera la façon dont deux intellectuels actifs dans le Japon de l’ère Meiji, Tenshin Okakura Kakuzô, et Ernest Fenollosa, ont diversement, au cours de l’évolution de leurs œuvres écrites, utilisé la référence à un paradigme de l’esthétique. Cette évolution parallèle pose, en creux, l’idée de problèmes inhérents au paradigme esthétique ; elle peut conduire à poser une distinction entre deux concepts de l’esthétique, selon la place et l’importance que l’on accorde à la notion de « beauté », et selon la façon dont on comprend le phénomène d’appréciation d’une forme ou d’un ensemble de formes en laquelle consisterait un « jugement esthétique ».


Simon EBERSOLT (Inalco / Paris I) 

Titre : L’attitude de Kuki devant la Guerre sino-japonaise et sa philosophie de la contingence. 

Résumé : En octobre 1937, Kuki Shûzô publie dans la revue Bungei shunjû un texte intitulé « Impressions sur l’actualité », où il apporte explicitement son soutien à la guerre du Japon contre la Chine, qui a éclaté le 7 juillet. 

Étant donné cette période où « tout devient politique » (Miki Kiyoshi), nous nous demanderons si la position de Kuki sur la guerre a un rapport avec sa philosophie de la contingence, notamment s’il a été fidèle à son œuvre en temps de guerre. Nous voudrions plus généralement réfléchir sur l’efficacité d’une philosophie de la contingence devant l’histoire : comment une telle philosophie peut-elle affronter une crise, notamment la guerre ?


La séance aura lieu : de 14h30 à 17h00 à l’Inalco, 65 rue des Grands Moulins, 75013 Paris, salle 5.28.